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La Ferme de La Croix Blanche de 1747 à 1920

La ferme en 2022, propriété du Département

Historique et transmission

Depuis 2002, les bâtiments de cette ancienne ferme du village, situés face au château à l’angle de la rue Saint Martin, sont la propriété du département de Seine-et-Marne qui souhaite en faire, après réhabilitation, un lieu d’activité de groupes touristiques, d’ateliers pédagogiques et d’accueil pour les visites scolaires.

 Avant cette cession, elle était occupée par la famille de Gilbert MOTTÉ qui s’y était installée en 1956 pour en assurer l’exploitation. Tout comme de nombreux bâtiments de Blandy, son histoire se confond depuis plusieurs siècles, avec celle du village.

En 1745, la ferme de la Croix Blanche, ainsi que celles de la Touretterie et du Rothoir, sont détenues par Dame Héleine LEFEBVRE- DESBOULLEAUX (orthographe variable selon les actes que l’on trouve aussi sous la forme de LEFEBURE-DES BOULLEAUX). Elle est à ce titre identifiée dans le plan de la paroisse de Blandy dressé en 1745 par DESQUINEMARE, géomètre du roi, pour le compte du maréchal duc de Villars, propriétaire du château de Vaux-le-Vicomte et de la seigneurie de Blandy.

La Ferme de la Croix Blanche en 1745- n° 2554- Plan Desquinemare (AD)

Elle était la veuve de Charles GUÉRIN, appartenant à une illustre famille de notables melunais, très aisés. Avant Charles GUÉRIN qui en était devenu propriétaire par contrat le 19 février 1718 (Bridou notaire à Paris), elle appartenait à François Paul LEFEBVRE DESBOULLEAUX, père d’Hélène (1706).

Le fait remarquable concernant la ferme de La Croix Blanche est qu’elle va rester dans la même famille pendant plus de deux cents ans, se transmettant de génération en génération (huit au moins). Charles GUÉRIN et son épouse ont eu une nombreuse progéniture. Ce sont les descendants de l’une de leurs filles, Elizabeth GUÉRIN, mariée à Louis LEFEBVRE, (prévôt de Melun, conseiller du roi, commissaire-enquêteur et examinateur au Châtelet de Melun) qui en seront toujours propriétaires en 1920, date de la vente sur licitation.

Charles GUÉRIN (1680-1738)

Le fils de Louis LEFEBVRE et d’Elizabeth GUÉRIN, Louis Jean Baptiste LEFEBVRE (1727-1791), avocat en parlement et directeur des Aides à Joigny (89) se marie en 1764, dans cette même ville, avec Marie Marguerite Jeanne FILLEU.

En 1791, au décès de Louis Jean Baptiste LEFEBVRE, son fils Antoine Louis LEFEBVRE MALHERBE (1773-1861), receveur d’enregistrement à Joigny, en devient propriétaire par héritage. C’est ce dernier, qui, en 1855, fera don à la commune d’une parcelle de terre qui viendra compléter les terrains achetés par la municipalité pour construire la mairie-école. Marié, sans enfant, il transmet par testament la propriété de la ferme de la Croix- Blanche à son frère Antoine Marie LEFEBVRE DEVAUX (juge de paix à Joigny) tout en nommant son épouse, Geneviève LOYRÉ, usufruitière du bien sa vie durant, laquelle décède en 1874. Antoine Devaux s’en dessaisit au profit de son fils, Louis Marie Félix LEFEBVRE DEVAUX (avocat, docteur en médecine).

En 1881, la ferme de La Croix-Blanche fait partie du contrat de mariage de Georges Louis Marie LEFEBVRE DEVAUX, fils de Louis Marie Félix. Elle est alors estimée à la somme de 80 000 francs.

En 1910, au décès de Georges Louis Marie LEFEBVRE DEVAUX, sa fille unique, Louise Marie Antoinette LEFEBVRE DEVAUX (1883-1912), épouse d’André PASTOUREL, hérite du bien. Cette dernière meurt prématurément en 1912.

Ce décès marque la fin de deux siècles de propriété par la famille Lefebvre

En 1920, le 22 mai, un jugement du tribunal de la Seine ordonne la vente aux enchères publiques sur licitation des divers immeubles composant la ferme appelée La Croix Blanche dépendant de la succession de Louise Marie Antoinette LEFEBVRE DEVAUX. Le tout d’une contenance de 37 hectares 20 ares et 43 centiares en 136 lots, pour une mise à prix globale de 68 000 francs.

Le 136ème lot est composé du corps de ferme (11 ares 56 centiares) et du jardin (4 ares 44 centiares), sa mise à prix étant de 6 900 francs.

La vente aux enchères publiques se déroule le 22 juillet 1920 dans la salle d’école. Les bâtiments de la ferme, le jardin et une partie des terres sont acquis par Berthe Jeanne SEIGNEUR, Veuve ANTHONIOZ, pour 16 400 francs.

De nouveaux bâtiments apparaissent au Cadastre napoléonien de 1812

À noter, qu’en 1941, lors de l’achat par la commune du jardin attenant à l’école et faisant partie de la ferme, celle-ci est toujours nommée « Ferme de la Croix Blanche » dans le rapport de la réunion du Conseil municipal du 5 août.

 

Description des bâtiments de la ferme 

Bail du 8 octobre 1747 par dame Hélène LEFEBURE DESBOULLEAUX veuve de Charles GUÉRIN, conseiller du roi à Eloi RICHARD, laboureur et Jeanne LEFEVRE, sa femme : …« Ferme située près la grosse tour de l’ancien château dudit lieu consistant en chaufour(chauffoir) servant de cuisine, chambres basses, chambres hautes et grenier au-dessus, écurie, vacherie, laiterie, toit à porcs, poulailler, granges à bled et avoine, cour au milieu desdits logis, close de murs, grande et petite porte pour entrer, ensuite petit jardin proche ladite ferme attenant le jardin de la maison de Pierre LAMBERT avec la quantité de 63 arpents 20 perches (soit une trentaine d’hectares) de terres labourables et 4 arpents 7 perches et demi de prés le tout ou environ…

Moyennant 250 Livres la première année et 200 Livres les années suivantes ainsi qu’un muid de bled (ancienne mesure de capacité des grains et des liquides, variable suivant les lieux ; en mesure de Paris, un muid vaut 12 setiers soit 1872 litres).

À signaler que du fait de leur propriétaire commun en ce milieu du 18ème siècle, les terres de la ferme de la Croix Blanche et celles de la Touretterie font l’objet d’un échange entre leurs fermiers respectifs.

Descriptif de la ferme lors de sa vente en 1920 :

« Au village de Blandy, un grand corps de bâtiments à usage de culture …composé d’une maison d’habitation distribuée : au rez-de-chaussée, une cuisine avec four, salle à manger et deux chambres à coucher. Cave voûtée sous partie de la maison.

Au premier étage, grenier à grains et chambre à fromages : autre grenier à grains sous les combles. (Les baux font obligation aux locataires de stocker les récoltes dans les bâtiments de la ferme).

En retour, laiterie avec pigeonnier au-dessus. Niche à chien et débarras sous l’escalier conduisant au premier étage.

Au nord, étables avec greniers au-dessus, écuries à la suite avec grenier au-dessus. Hangar de 3 travées, monté sur poteaux.

Au levant, granges à blé et à fourrage, ensemble de 5 travées.

Sur la rue Saint-Martin, poulailler, toit à porcs, clapier et cabinets d’aisances.

Cour au milieu des bâtiments…Dans laquelle cour se trouve un puits à pompe et abreuvoir à l’entrée de la cave ».

La configuration des lieux est toujours la même en 1950

Les baux de ferme 

Les propriétaires, nobles ou bourgeois, n’exploitant pas directement leurs terres, les louent à bail à un fermier-laboureur qui en assure les revenus. L’un de ces baux, signé en 1747 et rédigé en l’étude de Maître BLONDEAU, notaire à Blandy, pour la Ferme de La Croix Blanche, nous renseigne sur la fonction des bâtiments, l’étendue et la localisation des terres louées, exprimées dans la mesure de l’époque : l’arpent et la perche.

 

Les parcelles sont, la plupart du temps, très petites et ne ressemblent pas aux vastes étendues cultivées que nous connaissons de nos jours. L’élevage y occupe aussi une place non négligeable : bovins, ovins, mais également volailles, lapins, porcs qui participent à l’alimentation du fermier et de ses employés, lui assurant aussi un revenu complémentaire. La livraison de volailles fait partie intégrante du loyer dû au propriétaire.

 

Le travail s’effectue à la force des bras et avec l’aide des chevaux ou des bovins qui assurent les plus gros travaux des champs. Les charges incombant aux locataires, obligations et redevances subissent peu de modifications au cours des années si ce n’est une augmentation de loyer.

Dans les baux de la ferme de la Croix Blanche, les vignes ne sont jamais mentionnées alors que la culture en était répandue dans la région jusque dans la deuxième moitié du XIXème siècle. Autre fait notoire, la superficie de la ferme de la Croix-Blanche ne va que très peu varier au fil du temps sauf achats de quelques ares par Antoine Louis LEFEBVRE MALHERBE en 1850 et 1855. Quant aux bâtiments eux-mêmes, quelques améliorations seront faites au niveau du logement du fermier, plus confortable, ainsi que par la présence d’une pompe à eau dans la cour de la ferme en 1920.

À gauche étable, écurie et hangar- au fond grange à blé et à fourrage